Un conflit aux conséquences sociales méconnues:
la guerre de 1870, Marseille, monument aux mobiles de 1870

            La triste période de pandémie que nous venons  toutes et tous de subir a occulté la célébration du cent cinquantième anniversaire de la guerre franco-prussienne de 1870. Mais militairement la France n’est pas prête, n’alignant que 250 000 hommes face aux 800 000 de l’alliance germano-prussienne. Certes les sanglants champs de bataille (pensons au poème Le Dormeur du Val d’Arthur Rimbaud: «il a deux trous rouges au côté droit»…) ont été bien loin de nos côtes et de nos montagnes mais on en trouve ici des traces mémorielles.

            En haut de La Canebière, le monument aux mobiles de 1870 est un des rares de notre région (avec, par exemple, une plaque dans la cour d’honneur de la mairie de Nice ou des monuments dans les cimetières élevés par le Souvenir Français) à célébrer les victimes de ces batailles qui se soldent par la défaite de Napoléon III à Sedan et la proclamation à Paris de la Troisième République bientôt présidée par un Marseillais, le «singulier M. Thiers»…. Ces mobiles étaient des réservistes départementaux (des soldats ayant déjà effectué leurs temps sous les drapeaux), c’est pour cela que le monument marseillais réunit les blasons des principales communes bas-rhodaniennes qui envoyèrent des effectifs pour résister à l’invasion du territoire. La France armée couronne le monument, elle porte un bonnet phrygien, un drapeau et une épée. Des allégories secondaires représentent Marseille, Aix, Arles et Tarascon et de nombreux autres personnages rappellent la guerre de 1870. Sur les faces latérales, figure la liste des batailles livrées. Après un concours en 1892,  le monument est dessiné par Gaudensi Allar et sculpté par Turcan et Roux. Il est inauguré  le 25 mars 1894.

            La défaite amènera le 4 septembre la proclamation de la République. Ces événements se poursuivront dans le «rêve» de la Commune de Paris (mais n’oublions pas celui de la Commune de Marseille animée par Gaston Crémieux[1]) et leur programme social interrompu dans le sang, anticipateur pourtant des réformes du XXe siècle : de la séparation des Églises et de l’Etat, de l’égalité entre les hommes et les femmes, de la laïcisation de l’école ou de l’assistance médicale gratuite et de l’aide sociale…     

Olivier Vernier


[1] Analysé dès 1946 par Antoine Olivesi (1924-2009), La commune de 1871 à Marseille et ses origines, Marseille, rep. ,Lafitte, 2001, 168 p. et Roger Vignaud, Gaston Crémieux : la Commune de Marseille , un rêve inachevé, Aix, Edisud, 2003, 286 p.