« Au temps de chez ma tante » :
Elie-Jean Vézien : médaille de commémoration du tricentenaire du Crédit municipal de Marseille, bronze, 1973, collection privée
Apparus au XVe siècle en Italie du Nord pour combattre l’usure alors fréquente bien qu’interdite par l’Eglise, les mont-de-piété sont des œuvres d’assistance liées à la charité chrétienne[1], reconstitués en 1801 sous Napoléon[2]ils deviennent municipaux aux termes de la loi du 24 juin 1851 sous la Seconde République. Par le décret du 24 octobre 1918, dans le cadre d‘une économie de reconstruction à l’issue de la Grande Guerre, ils sont institués en caisses de crédit municipal[3]. Notre région réunit quatre caisses (Avignon, Marseille, Nice et Toulon et leurs agences (d’Aix à Carpentras et de Gap à Cannes).
Cette sobre et importante médaille de bronze a été frappée sur demande de la direction de la caisse marseillaise pour offrir aux administrateurs et aux autorités municipales.
L’avers représente l’animal symbolique des caisses de crédit municipal : le griffon emprunté à la mythologie antique doté d’un corps de lion, d’ailes et d’un bec d’aigle, il gardait les mines d’or d’Apollon dans le désert de Scythie
Le revers est orné des grandes armes ornées de la ville «Massilia Civitas » d’après la sculpture de P. Puget, armoiries que l’on retrouve souvent sur des médailles frappées, ainsi celle de la foire internationale de 1924.
Le marseillais Elie-Jean Vézien (1890-1982)[4]est un célèbre graveur-médailleur de la cité phocéenne formé à l’école des Beaux-Arts de Marseille puis à celle de Paris, Grand Prix de Rome en 1921, professeur aux Beaux-Arts de Marseille, il la dirige de 1942 à 1961, membre de l’Académie de Marseille. Sculpteur de la colonne de droite représentant la France sur le monument dédié rue de Rome à la mémoire d’Alexandre Ier de Yougoslavie et du ministre des Affaires Étrangères Louis Barthou assassinés sur la Canebière en 1934. Il collabore avec le graveur général de la Monnaie de Paris Lucien Bazor. Il eut une action sociale au sein des associations d’anciens combattants de la Grande Guerre car blessé en 1916.
Quant à l’expression populaire « chez ma tante », il s’agit d un terme ironique qui venait des personnes qui, ne voulant pas avouer leur recours au mont-de-piété, expliquaient leur soudaine rentrée d’argent par un apport venu de la proche famille.
Olivier Vernier
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[1]Sur la question demeure l’étude classique : Léon Lallemand, Histoire de la charité. T IV, Les temps modernes,Paris, Picard, 1912.
[2]Voir A.-François Simon, Le mont-de-piété de Marseille depuis ses origines jusqu’au 10 mars 1807, thèse, droit, Aix, Marseille, Leconte, 1939, 127 p.
[3]Pour deux exemples académiques hors de notre région : Yannick Marec, Le Clou rouennais : des origines à nos jours, 1778-1982 : du Mont de piété au Crédit municipal, contribution à l’histoire de la pauvreté en province, Rouen, P’tit Normand, 1983, 232 p. et Guillaume Pastureau, Le microcrédit social : le cas du prêt-sur-gages au crédit municipal de Bordeaux depuis 1801 : un « argent secours » en perspective historique, thèse, sciences économiques, Bordeaux 4, 2013.
[4]André Alauzen et Laurent Noet, Dictionnaire des peintres et sculpteurs de Provence-Alpes-Côte d’Azur, Marseille, Jeanne Laffitte, 2006, p.p. 455-456.