Les origines du régime spécial de la SNCF: l’exemple des Chemins de fer de la Provence, XXe siècle 

Les importants mouvements sociaux des années 1986-1987 notamment sur le statut de la SNCF ont rappelé alors l’antériorité des métiers à risque que générait l’exploitation des chemins de fer (en particulier des personnels de conduite) au sein de nombreuses compagnies privées.

Notre région fut naturellement concernée avec la puissante Compagnie du PLM (Paris Lyon Méditerranée) créée le 19 juillet 1857.  Elle était de loin la plus importante des compagnies ferroviaires françaises par son trafic, le nombre de passagers transportés et la taille de son infrastructure. PLM dessert progressivement toutes les destinations touristiques de la Côte d’Azur, puis développe son réseau ferroviaire et touristique dans les Alpes, à l’origine même de ce qu’on appellera désormais de façon universelle le tourisme. Les personnels bénéficièrent d’un droit social protecteur avec la création ainsi de cités modernes d’habitation pour le personnel[1] alors qu’un habitat précaire voir indigne prévaut encore dans de nombreuses régions industrielles du pays.

 Toutefois des compagnies secondaires sont aussi constituées : ainsi l’ancien réseau de la Compagnie des chemins de fer du Sud de la France, devenu la propriété, de 1925 à 1933, de la «Société des chemins de fer de Provence». Cette ligne est aussi connue sous le nom de «train des Pignes».

A partir de 1929, de graves conflits sociaux éclatent dans l’ensemble du secteur ferroviaire. La nécessité de centraliser la gestion des infrastructures, du matériel et du personnel cheminot conduit à la nationalisation de l’ensemble des principales activités ferroviaires en France avec la nationalisation de la SNCF en 1938, hormis justement la ligne de Nice à Digne qui subsiste de nos jours et est exploitée depuis le 1er janvier 2014 par la Régie régionale des transports de Provence-Alpes-Côte d’Azur (RRT).

Aussi des sociétés de secours mutuels sont créées accordant une protection sociale et sanitaire précurseure aux agents et à leurs familles.  «Un réseau de médecins, de dentistes et pharmaciens est agréé pour dispenser des soins et fournir des médicaments aux agents tandis qu’une caisse de secours  prend en charge l’aide aux agents et à leurs familles en cas de maladie, infirmité ou décès. La convention de 1904 institue une caisse de retraite pour le version d’une pension aux agents après leur départ en retraite du réseau. En 1908, une mutuelle est constituée sous le nom de la Vigilante «pour secourir les veuves et les orphelins des ouvriers des chemins de fer et des tramways du Sud de la France». Dans l’entre deux-guerres une seconde mutuelle voit le jour patronnée par le syndicat sous le nom de Société de prévoyance des personnels des CF»[2]Vichy saura intégrer cette protection sociale et les textes de la Libération affilieront le personnel au nouveau régime de la Sécurité sociale. Quant au comité d’entreprise, il reçoit, comme dans l’ensemble de la France, des attributions sociales: gestion de résidences saisonnières : une maison cantonnière à Thorame-Haute (04) est aménagée; les arbres de Noël à Nice de l’entreprise; une association sportive (jeux de boules et équipe de football).

Mais également des manifestations de bienfaisance sont encore très tardivement organisées perpétuant la charité privée du siècle antérieur d’une bourgeoisie locale d’affaires philanthrope.

Olivier Vernier

Couverture du livre “Le siècle du train des pignes”, José Banaudo, Les éditions du Cabri

[1] Voir Robert Mencherini, Jean Doménichino, David Lamoureux, Cheminots en Provence : des voix de la mémoire aux voies de l’avenir, Partis, La Vie du rail, 2001, 247 p.

[2] José Banaudo, Histoire des Chemins de fer de Provence-1. Le siècle du train des pignes, Breil, Editions du Cabri, 1991, 320 p.; p .107.

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