Aux termes de la loi du 26 décembre 1961 relative à l’accueil et à la réinstallation des Français d’outre-mer, les rapatriés[1] sont les:
« Français ayant dû quitter ou estimé devoir quitter, par suite d’événements politiques, un territoire où ils étaient établis et qui était antérieurement placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France.
Trois conditions sont fixées pour avoir la qualité de rapatrié :
avoir été installé dans un territoire ayant accédé à l’indépendance; avoir eu la nationalité française au moment de l’indépendance de ce territoire avoir quitté ce territoire par suite d’événements politiques directement liés à l’indépendance. »
Pour les départements d’Algérie, environ 800 000 pieds-noirs –dont certains qui avaient émigré notamment d’Italie pour des raisons économiques – quittent l’Algérie – dans les conditions dramatiques que l’on sait- dont 512 000 entre les mois de mai et d’août 1962.
Pour leur permettre à ces populations à la destinée souvent précaire, de continuer à bénéficier d’une couverture sociale[2], le Secrétariat d’Etat aux Rapatriés et le Ministère du Travail leur délivrent via les préfectures une carte temporaire de Sécurité sociale pour permettre les remboursements des frais médicaux et pharmaceutiques.
La carte n’est valable qu’une année – le temps de reconstituer les dossiers-, une carte définitive est établie par la suite par l’organisme de Sécurité sociale dont relève le rapatrié «du chef de son activité».
Cette rapatriée originaire d’une île napolitaine, s’installera d’abord en Auvergne, puis rejoindra le Midi par la suite.
Olivier VERNIER
Carte temporaire de Sécurité sociale (1962), collection privée
[1] Sur la question: Abderahmen Moumen, Entre histoire et mémoire. Les rapatriés d’Algérie; Dictionnaire bibliographique, Nice, Jacques Gandini, 2003, 129 p.
[2] Gilbert Mussini, La Sécurité sociale en Algérie, Alger, Ferraris, 1950, 211 p.
Voici le programme du cycle de conférences d’histoire de la médecine organisé par l’association des amis du patrimoine médical et le conservatoire du patrimoine médical de Marseille.
Les métiers de la cuisine sont en Europe des métiers souvent ignorés, voir méprisés mais pénibles en raison des conditions de travail car ils sont soumis aux extrêmes chaleurs et aux chambres froides et confrontés à de nombreuses blessures et accidents en raison de «la pression des fourneaux»: chutes sur des sols glissants, coupures, brûlures dues aux projections de liquides aux yeux et au visage et sur les membres.
Une partie des inventeurs et des exécutants de la cuisine dite «domestique» quitte châteaux et demeures bourgeoises dans la seconde partie du XIXe siècle pour s’établir à leur compte. C’est le siècle, par excellence, «du mangeur» selon l’analyse de Jean-Paul Aron[1].
Ces travailleurs de la cuisine professionnelle[2] qui se développent à partir du XIXe siècle à Paris et dans les capitales régionales, dans les palaces, les cuisiniers, des chefs de cuisine aux apprentis, prennent conscience de la nécessité d’une protection sociale. D’ailleurs, «l’inventeur de la cuisine moderne »: Auguste Escoffier (1846-1935)[3]œuvrera dans ce domaine d’action sociale.
Certains s’organisent et le font à compter du développement de la mutualité avec la Charte de la Mutualité de 1898. Par définition, les chefs – qui ne sont pas encore devenus, pour certains «étoilés» – grâce aux guides gastronomiques- comme le seront leurs héritiers et leurs héritières (dont les « mères lyonnaises ») du siècle suivant- sont souvent individualistes mais ils savent organiser une entraide et une prévoyance entre eux et vis-à-vis de leurs nombreux personnels qu’il faut fidéliser.
C’est le cas à Nice avec cette Fraternelle qui a l’originalité de réunir des cuisiniersexerçantlocalement, mais aussi, dans des régions saisonnières (Normandie: Deauville; Le Touquet. Vichy; les stations de cure vosgiennes: Vittel, Contrexéville; Biarritz…). Parfois, même, ils «font les saisons» en Grande-Bretagne, Suisse, Autriche ou Italie… C’est qu’en effet les chefs de cuisine partent avec leurs brigades entières «faire la saison» avant de revenir à Nice, Cannes, Menton… D’ailleurs, un unique document photographique servait alors de «certificat de travail» original : la photo de la brigade devant le palace avec un panneau précisant le lieu et la date[4].
Si des accidents surviennent lors de ces «saisons», la société de secours mutuels La Fraternelle, la première de France dans ce secteur d’activités puisque fondée en 1878, lorsque la ville devient une destination hivernale prisée, prend en charge les soins locaux (pharmaceutiques et médicaux, voir hospitaliers) et parfois le rapatriement. Elle incite aussi les travailleurs à se constituer des retraites complémentaires dans des milieux professionnels où les salaires restent (et resteront) encore souvent limités. Elle se charge aussi de servir de «bureau de placement».
Ce diplôme tardif (1954) récompense un cuisinier administrateur niçois méritant.
Olivier Vernier
Diplôme d’honneur de la société mutualiste La Fraternelle des Cuisiniers de Nice et des régions saisonnières, 1954, collection privée
[1] Jean-Paul Aron, Le Mangeur du XIXe siècle, Paris, Denoël, 1976, 310 p.
[2] Loïc Bienassis, La grande histoire de la gastronomie, Paris, Larousse, 2024, 255 p,
[3] Le Musée Escoffier de l’Art Culinaire à Villeneuve-Loubet (06) consacre une exposition permanente à l’action humaniste du chef dans la mutualité, la prévoyance et la lutte contre le paupérisme.
[4] L’anecdote nous fut rapportée par un hôtelier grassois Émile Litschgy: La vie des palaces: hôtels de séjour d’autrefois, Spéracèdes, TAC motifs, 1997, 352 p.
Les pandémies récentes ont hélas rappelé leurs dramatiques conséquences pour les populations vulnérables. Pendant longtemps, la peste aux conclusions souvent funestes, a été légitimement redoutée. En 1629, une épidémie de peste se manifeste à Lyon, Saint-Etienne, Béziers, Montpellier, le Gévaudan Valréas et Arles. Elle se déclenche dans cette ville en juillet 1629 et fera 900 morts malgré les quarantaines et les mesures sanitaires prises par les autorités royales, processions démonstratives et bénédictions nombreuses dans ce Sud « très chrétien » tentent de protéger les cités et les campagnes.
Néanmoins, la vie économique doit continuer. Les autorités municipales (consuls gouverneurs) d’Arles, cité de foires et marchés depuis le Moyen âge, en raison de la proximité du Rhône, délivrent ainsi ces billets de santé pour attester, après examen médical, de l’état non contagieux de ceux qui quittent la ville : « est party de cette ville d’Arles, en laquelle n’y a (par la grace de Dieu) aucun soupçon de peste ny mal contagieux ».
Le billet (12,3 x 11,8 cm) est orné du Lion des armoiries arlésiennes attesté depuis 1180.
Olivier Vernier
Billet de santé, Arles (Bouches-du-Rhône) 1629, collection privée
Dans des chroniques et articles précédents ont été évoquées dans notre région méditerranéenne les confréries de pénitents, pieux laïques catholiques qui se vouent depuis le XVIe siècle à l’assistance et à l’entraide envers les plus démunis, incarnant ainsi la vertu théologale de la charité[1]. Ainsi les pénitents blancs du Saint-Esprit dans le quartier du Panier sont approuvés en 1558.
Au XIXe siècle alors qu’après leur suppression lors de l’ère révolutionnaire, les confréries marseillaises, désignées par la couleur de leur habit, sont en «sommeil» ou entrent dans la clandestinité[2], elles se reconstituent de manière complexe[3].
Pour rentrer dans la confrérie des bourras, il fallait «être homme de bien et de bonne renommée, point cabaretier, tavernier, renieur, blasphémateur, paillard, concubinaire, contrevenant aux lois de Dieu et de l’Église» (Augustin Fabre dans Les Rues de Marseille). Une probité sûrement mise à l’épreuve par la pratique de… l’auto-flagellation!
Dans une ville où la laïcisation républicaine à partir de la Seconde République [4] et le socialisme municipal, à partir de la Troisième République[5] finissent par s’imposer[6], la place à l’action caritative des confréries de pénitents se réduit, d’autant qu’une philanthropie privée laïque se développe aussi[7].
Des regroupements s’opèrent: le 18 juillet 1892, la confrérie des Bourras (du Saint-Nom-de Jésus) surnommés ainsi en raison de l’habit en bure qu’ils portent, fusionne avec la confrérie des pénitents noirs.
Une des dernières processions publiques des confréries a lieu sur les pentes de Notre-Dame de la Garde lors des fêtes du couronnement de Notre-Dame de la Garde entre les 18 et 21 juin 1931, cérémonie faste pour l’ensemble de la Provence et au delà. Les blancs portent ainsi la cagoule, symbole d’anonymat.
Olivier Vernier
Une des dernières processions publiques des pénitents de Marseille, 1931, Fernand Detaille, éd.
[1] Pour une synthèse, se reporter aux travaux éminents du membre de notre conseil scientifique : le professeur Régis Bertrand ; ainsi : Les compagnies de pénitents de Marseille : XVIe-XXe siècles, Marseille, La Thune, 1997, 158 p. Pour une première analyse des pénitents gris : Alexandre Julien, Chronique historique de l’archiconfrérie des pénitents disciplinés sous le titre du Saint Nom de Jésus (dits Bourras) de la ville de Marseille. Pour la consolation des criminels condamnés au dernier supplice et l’ensevelissement de leurs corps, le rachat des prisonniers pour dettes, …, Marseille, Vial, 1865, 417 p.
[2] R. Bertrand, « “Sommeil” ou “clandestinité” ? Les pénitents de Marseille entre Louis XVI et Louis XVIII », Provence historique, t. 39, fascicule 156, avril-juin 1989, pp. 185 à 195.
[3] Ainsi, Lucien Fontanier, Confrérie des pénitents noirs de la Décollation de Saint-Jean-Baptiste : Recherches historiques sur les Confréries de Pénitents de Marseille, Aix, Niel, 1923, 91 p.
[4] Analysé par Norbert Rouland, Le Conseil municipal marseillais et sa politique de la IIe à la IIIe République: 1848-1875, Aix-en-Provence, La Calade, 1974, 408 p.
[5] Cf. Patrizia Dogliani, Le socialisme municipal: en France et en Europe, de la Commune à la Grande guerre, Nancy, Arbre bleu, 2018, 352 p.
[6] On le voit : Dr Mazade, Département des Bouches-du-Rhône. Assistance publique. 1° assistance infantile ; 2° protection du premier âge ; 3° assistance médicale gratuite ; 4° pensions de retraite pour les vieillards indigents : 5° oeuvre des crèches, Marseille, Impr. Méridionale, 1898, 278 p.
[7] Emile Camau, Les Progrès de la solidarité. L’Assistance publique et privée dans les Bouches-du-Rhône (1801-1911), Marseille, Barlatier, 1922, 111 p.
Fils de soyeux lyonnais, Jean Dufourt[1] (1887-1953) connaît bien ce milieu, ses riches heures et ses malheurs, juriste de formation et romancier, il offre une satire sociale chargée d’ironie avec son premier roman couronné de succès: Calixte ou l’introduction à la vie lyonnaise. C’est l’histoire de l’arrivée à Lyon d’un Parisien, Philippe, venue travailler dans le milieu fermé des soyeux et qui cherche à s’intégrer au sein de la bonne bourgeoisie régentant la ville et ses rouages, et demande à son ami et camarade de la Grande guerre, Calixte de le guider. Il démentait la citation de la romancière Colette dans la Vagabonde (1910): «Cinq jours à Lyon sont interminables.» Certains Lyonnais s’y reconnurent en tout cas pendant près de quatre-vingts ans dans leurs caricatures, ancrés dans leurs quartiers comme autant de bastions: l’aristocratique Aînay contre les populaires Brotteaux, … dans une sourde rivalité sociologique.
Certes, nous ne sommes pas dans notre région d’études méridionales mais bien encore dans le Sud-Est…
La bienfaisance lyonnaise[2], à la fois discrète et démonstrative, moralisatrice[3] mais aussi paradoxale comme bien d’autres villes de l’entre-deux-guerres apparaît dans les lignes ironiques de cet ouvrage réédité de nombreuses fois.
Lors d’une conversation, un journaliste lyonnais cynique dit au héros parisien: «Tel d’entre nous dont les charités sont manifestes, publiques, éclatantes, ne donne à ses employés que des appointements de misère, et sa femme quêteuse obstinée pour les pauvres, dispute avec ses domestiques sur une augmentation de gages de dix francs..»[4]
Des stratégies subtiles sont alors conseillées par Calixte afin de prodiguer son attachement à la cité élue: « Intéressez-vous, me dit-il, à nos œuvres charitables. Ce sera une excellente façon de vous faire connaître avantageusement. Dès lors, je me donnai la joie de voir, sur les journaux, mon nom suivi ou précédé de celui de mon ami dans la plupart des souscriptions publiques. A vrai dire, je me serais bien contenté de n’y faire figurer que mes initiales, mais Calixte m’avait énergiquement dissuadé de pratiquer la charité anonyme qui n’est pas édifiante. J’avais copris du reste à ses propos que, lorsque l’on avait l’honneur d’être introduit dans une certaine société, on se devait d’adopter en tout et partout une conduite exemplaire. Dirai-je quelle contrainte ce fut pour moi qui y avais été si peu préparé?»[5]
Les contraintes professionnelles l’éloignent de certaines étapes: « Les affaires hélas ! ne me permettaient pas de la (Marie-Antoinette, la jeune fille dont il est épris) suivre aux sermons de charité auxquels elle assistait avec le même empressement, car elle était très charitable et très pieuse.»[6]
Il n’empêche que cette propension à la charité de la jeune lyonnaise est tout de même à la fois, maîtrisée et surprenante, qu’on en jug : «Nous revenions…d’une conférence dominicale. A l’entrée du pont Tilsitt, Marie-Antoinette s’arrêta en face d’une mendiante aveugle qui, assise sur un pliant bas, offrait d’une main des lacets et, de l’autre agitait unesonnette. « Combien vos lacets, ma bonne femme? demanda la jeune fille.- Douze sous la paire, douze sous seulement, répondit la pauvresse.- Mais si je vous en prenais deux, reprit Marie-Antoinette, ne me laisseriez-vous pas à vingt-deux sous » L’aveugle étouffa un sourire: «Comme vous voudrez ma bonne dame. C’est une charité!» Et je vis ma bien-aimée prendre les deux paires de lacets et compter vingt-deux sous dans la main tendue de la mendiante. «Papa m’a dit de toujours marchander», nous déclara-t-elle alors d’un petit air triomphant. Calixte souriait, mais je me sentais un peu gêné. Une nouvelle surprise m’attendait à l’autre bout du pont. Là, un malheureux cul-de-jatte implorait l’aumône avec des lamentations que Calixte lui même n’aurait jamais osées. Alors je vis ma bien-aimée ouvrir de nouveau son sac à main et en retirer une petite pièce dorée qu’elle déposa, sans s’arrêter et le plus simplement du monde, dans la casquette de l’infirme. Le croira-t-on? Ce double geste de Marie-Antoinette m’en apprit davantage sur l’âme lyonnaise que toutes les observations que j’avais recueillies si patiemment depuis seize mois.»[7]
Pour conforter son insertion dans la bourgeoisie entre Saône et Rhône , le héros va s’installer dans l’appartement d’une dame d’œuvres, parente de la jeune fille qu’il convoite: Mme Greillon-Delamotte, parangon de vertus caritatives récemment décédée: Sa charité lui permet de s’intégrer d’avantage. «Enfin, je pris possession du cher appartement. De douces joies m’y attendaient. A peine étais-je installé qu’une volée de dames quêteuses et des soeurs de charité s’abattit sur mon cordon de sonnettes. Ah! combien Mme Greillon-Delamotte était digne de la vénération publique! Femmes repenties, Femmes en couches, Enfants tuberculeux, Orphelins, Incurables, Sourds-Muets, Vieillards indigents, etc; pas une misère, pas une infortune, pas une déchéance que cette femme éminente ne secourût. On venait me prier de continuer ses libéralités. «Oui, madame oui, ma sœur, répondais-je en proie à une sorte d’ivresse intérieure. Rien ne sera changé, n’en doutez-pas. Les aumônes que vous receviez de mains pieuses de Mme Greillon-Delamotte vous seront remises en mémoire d’elle.» A la fin de la semaine, je me trouvai zélateur satisfait et reconnaissant d’une douzaine d’œuvres.»[8]
Olivier Vernier
Jean Dufourt, Calixte ou l’introduction à la vie lyonnaise, Lyon, 1926.
[1] Charles Albert, « Trois romans sur Lyon et les Lyonnais », Études, 20 mai 1929.
[2] Pour un exemple : Paul Gonnet, L’adoption lyonnaise des orphelins légitimes (1536-1793), thèse, droit, Paris, Pichon et Durand-Auzias, 1935, 688 + 251 p.
[3] Pour deux exemples : Paul Gonnet, L’adoption lyonnaise des orphelins légitimes (1536-1793), thèse, droit, Paris, Pichon et Durand-Auzias, 1935, 688 + 251 p. ; Bernadette Angleraud, Lyon et ses pauvres : des œuvres de charité aux assurances sociales, 1800-1939, Paris, L’Harmattan, 2011, 340 p.
[4]Calixte ou l’introduction à la vie lyonnaise, Paris, Paris, Plon, p. 61.
Surnommé « le Giono de la Peinture »[1], le Toulonnais Léon Sabatier (1891), né dans un milieu modeste, boursier de la ville de Toulon, part à Paris AUX Beaux-Arts où il est rebuté par l’académisme ambiant, pourtant, il exécute alors de nombreux paysages académiques méditerranéens (souvent sans présence humaine); à Montparnasse, il fréquente Derain, Modigliani, Kisling, Van Dongen… Après la Grande guerre, il rejoint Toulon de 1930 à 1945 et devient professeur aux Beaux-Arts. Après son engagement dans la Guerre civile espagnole avec André Malraux, puis dans la Résistance, il retourne à Paris et aborde désormais une nouvelle voie artistique; en 1959, il s’installe à Tourrettes-sur-Loup (Alpes-Maritimes) où il meurt en 1965. «Peintre des résonnances secrètes des paysages et des âmes », « Peinture sombre, sourde avec de profonds bruns noirs, des gris doux..»
La sensibilité sociale de l’artiste s’exprime souvent dans des portraits de personnes humbles et dans cette commande de la Caisse d’Epargne de Toulon: une scène traditionnelle de moissons, mais au premier plan la paysanne au fichu accomplit un geste symbolique : la remise d’un livret de la Caisse d’Epargne à l’enfant qui se tient près d’elle. C’est la période difficile de la reconstruction de l’économie et de la société qu’il faut évoquer.
Olivier Vernier
Léon Sabatier (1891-1965) : Moissons au Beausset, huile sur toile, c. 1946, Nice, Caisse d’Epargne.
[1] Léon Sabatier 18791-1965 « Le Giono de la Peinture », Société Historique de Tourrettes, n°23, janvier 2020, 30 p.
Notre Comité a eu la tristesse d’apprendre le décès le 20 avril 2025 d’un «historien de convictions, passeur de mémoire, homme de rigueur, de transmission et d’engagement», Robert MENCHERINI (1945-2025), professeur honoraire des universités en histoire contemporaine, agrégé d’histoire, docteur en histoire, directeur de recherche à l’Institut universitaire de formation des maîtres, directeur de recherche à l’Institut universitaire de formation des maîtres, directeur de recherche à l’Institut universitaire de formation des maîtres, Président des Amis du Musée de la Résistance en Ligne en Région Provence-Alpes-Côte d’Azur (MUREL), Président-Fondateur de Provence Mémoire Monde Ouvrier (PROMEMO), membre des conseils d’administration et scientifique du Mémorial des Milles.
Originaire d’Aubagne, spécialiste d’histoire politique et sociale contemporaines, il soutint sa thèse à Aix en 1984 sous la direction d’Emile Temime: L’ union départementale C.G.T. des Bouches-du Rhône de la libération à la scission (1948) , il publia, entre autres: «La Libération et les entreprises sous gestion ouvrière: Marseille, 1944-1948», 1994; sa synthèse d’histoire politique et sociale de Marseille et des Bouches-du-Rhône de 1930 à 1950: «Midi rouge, ombres et lumières» Paris, 2004, 2009, 2011, 2014, reste une référence; il dirigea «Cheminots en Provence: des voix de la mémoire aux voies de l’avenir (1830-2001)», 2011, et analysa «Les grèves “insurrectionnelles” de 1947», 2023.
Il reçut le Prix Thiers de l’Académie des Sciences, Arts et Belles Lettres d’Aix-en-Provence, et aussi, aussi le Grand prix historique de Provence, Maréchal de Villars de l’Académie des Sciences, Lettres et Arts de Marseille. Pour son dernier ouvrage «Berty ALBRECHT – de Marseille au Mont Valérien, une féministe dans la Résistance» une mention lui a été attribuée à l’occasion du Prix Littéraire de la Résistance par le Souvenir Français au Sénat en décembre 2023.
R. Mencherini fut un des correspondants régionaux du Maîtron (Dictionnaire biographique Mouvement ouvrier et social) et à ce titre, rédigea la notice de notre président-fondateur Charles Bonifay. Entre 1981 et 1998, il est aussi le correspondant pour les Bouches-du-Rhône de l’Institut d’histoire du temps présent (IHTP-CNRS).
Sensible également à l’histoire de la protection sociale dans notre région, il nous encouragea de ses conseils pertinents, avec toujours sa bienveillance, son humanisme et son sourire coutumier; il répondait toujours à nos diverses sollicitations, notre dernier numéro spécial sur «Les Italiens et leur protection sociale en France, XIXe-XXe s.)» fut vraisemblablement, une des ses dernières lectures, il lui rappelait ses origines familiales.
Au sortir de la guerre, les détresses sont légion dans les villes bombardées (dans notre région: Nice, Cannes, Toulon, Marseille…); mais les campagnes sont aussi concernées : vieillissement des populations, hémorragies démographiques suite aux combats, déportations et exactions de l’ennemi. Le tissu social du monde rural est profondément déchiré, dans la mesure où l’agrarisme de Vichy reposant sur la Charte paysanne du 2 décembre 1940 a créée des bouleversements notoires en voulant dominer le monde du travail agricole. Aussi un mouvement associatif, d’essence chrétienne, se créée en 1945: les associations familiales rurales AFR avec comme objectif «de venir aide aux familles et de créer des emplois pour les jeunes filles du monde rural avec l’idée de créer une profession nouvelle et de ralentir l’exode rurale.»[1] Il faut donc apporter une aide à ces familles en intervenant à leur domicile, dans leur cadre de vie. Un service est inventé : l’aide familiale rurale.
L’objectif est double: à la fois social, en aidant les familles dans les tâches de la vie quotidienne, et économique en créant des emplois de proximité. » L’ensemble de la France rurale adopte ce modèle.
En 1976, Le mouvement devient l’ADMR (Aide à domicile en milieu rural) pour concrétiser le choix de diversifier ses services (aides aux familles, aide aux personnes âgées) et en 1988, les actions sociales se développent: à la suite à la création des Services de Soins Infirmiers et d’auxiliaires de vie pour les personnes âgées et les personnes handicapées, l’ADMR développe de nouveaux services rendues nécessaires par les précarités rurales: livraison de repas, téléassistance, accueil de la petite enfance (crèches, haltes garderies, centres de loisirs, sans hébergement), petites unités de vie pour personnes âgées ou handicapées….
Actuellement, les associations départementales réunissent 94 000 salariés et 78 000 bénévoles.
Cette médaille commémorative est remise aux bénévoles (comme ici dans le Var) et aux salariés.
Olivier Vernier
Avers de la médaille du 30e anniversaire de la fondation de l’Aide à domicile en milieu rural, bronze, 1975, collection privée.
[1] Voir : François Romatif, «Union nationale des associations d’aides familiales rurales», in Les mouvements familiaux et leur institution en France – Anthologie et sociale, 2006, pp. 258-285 et Annie Morel, «L’ADMR, un acteur incontournable du monde rural», Pour, 2009, pp.120-124.
Si c’est le 16 octobre 1958 qu’est promulgué Code de la sécurité sociale juste après l’instauration de la VeRépublique, il connaîtra 42 révisions à compter de 1961, il ne faut pas oublier qu’à la fin de la IVe République un code réunissant aussi des dispositions de protection sociale, en ces temps encore de reconstruction économique et sociétale, avait été adopté le 24 janvier 1956, il prendra son nom actuel de Code de l’action sociale et des familles en 2000.
Il réunit cinq thèmes de ces périodes difficiles d’après guerre unissant action publique et actions privées: la protection sociale de la famille (des institutions familiales à la fête des mères); la protection sociale de l’enfance (des enfants secourus aux pupilles inadaptés); les différentes formes d’aide sociale (de l’aide à domicile des personnes âgées aux aides en matière de logement et d’hébergement); des établissements de bienfaisance privés; le service social (du rôle des assistants de service social à la coordination des services sociaux dans l’intérêt des personnes aidées, nationaux comme étrangers).
Pour faire connaître ce texte (et d’autres publications) aux administrations qui devront le commander afin de se documenter de façon synthétique et aux personnes concernées sujets de droits sociaux, la Direction des Journaux officiels fait placarder ce texte dans les organismes sociaux, les hôpitaux, les établissements de soins, les mairies, les préfectures et les sous-préfectures, comme pour cet exemplaire dans les Hautes-Alpes.
Olivier Vernier
Affiche administrative publicitaire de la promulgation du Code de la famille et de l’aide sociale, Paris, Imprimerie des Journaux Officiels, 1956, collection privée