Quand les plaques disent la persistance de la charité et de l’entraide dans nos villes à l’époque contemporaine

Il s’agit des “plaques” au sens de l’’historien aixois de la langue méridionale Jean-Claude Bouvier : Les noms de rues disent la ville, Paris, Bonneton, 2007, 223 p.

Si le XIXe siècle est assurément le siècle des bienfaiteurs dans l’ensemble de notre pays[1] et dans notre région[2], cette volonté des personnes privées de «compléter» dans les temps républicains de la Troisième république l’assistance publique, puis sous la IVe et la Ve république l’action sociale des organismes de sécurité sociale, perdure. Les actions des particuliers se concrétisent par des libéralités charitables de leur vivant (fondation) ou après leur mort (legs). Les collectivités locales bénéficiaires tiennent à commémorer ces actions d’entraide dans l’espace public : les noms de rues appelés en droit administratif «hommages publics» en portent témoignage. Quelquefois sont élevées pour les plus importants sur l’espace public des statues : on connaît bien pour Marseille la statue érigée devant la cathédrale de la Major de Mgr de Belsunce, évêque lors de l’épidémie de peste[3] qui toucha cruellement la Provence en 1720. Mais les institutions religieuses et laïques souhaitent entretenir le souvenir des actes de charité et d’entraide. Nous avons eu l’occasion de les évoquer lors d’articles précédents sur notre site ou dans les pages de notre revue annuelle. On peut regretter souvent que les traces de plaques commémoratives et mémorielles se perdent néanmoins lors de rénovations urbaines rendues nécessaires certes par l’amélioration de l’habitat et de l’environnement.

            Dans le vieil Antibes, une plaque de marbre évoque le souvenir d’un couple issu de vieilles familles antiboises: Jacques René Gansard (1894-1977) donateurs d’un immeuble à la paroisse d’Antibes « pour la garderie enfantine » permettant aux jeunes mères de confier leurs enfants avant que l’école maternelle ne puisse les accueillir. Dans la rue du docteur Jacques Ugo menant au centre de Vallauris une plaque apposée sur la façade de la MJC rappelle la fondation par Paul Derigon, (1901-1982) maire communiste entre 1945 et 1977, d’une «maison du peuple» «pour les habitants de Vallauris Golfe Juan que j‘ai tant aimés», lieu alors de convivialité et de culture entre les générations.

Olivier Vernier


[1] Pour une analyse de synthèse : François Ewald, Histoire de l’Etat providence : les origines de la solidarité, Paris, Grasset, 1996, 317 p. ; Colette Bec, L’assistance en démocratie : les politiques assistantielles dans la France des XIX et XXe siècles, Paris, Belin, 1998, 254 p ; André Gueslin, Gens pauvres, pauvres gens dans la France du XIXe siècle, Paris, Aubier, 1998, 314 p ;  Yannick Marec, Pauvreté et protection sociale aux XIXe et XXe siècles : des expériences rouennaises aux politiques nationales, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, 404 p.

[2] Un exemple : Olivier Vernier, D’espoir et d’espérance : l’assistance privée dans les Alpes-Maritimes au XIXe siècle, 1814-1914 : bienfaisance et entraide sociale, Nice, Serre, 1993, 542 p.

[3] On se reportera avec profit à la synthèse d’histoire moderne de Gilbert Buti, professeur émérite d’Aix-Marseille Université : Colère de Dieu, mémoire des hommes. La peste en Provence 1720-2020, Paris, Cerf, 309 p.


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